C’est la base line du réseau des parcs en France. Une promesse forte, qui englobe les activités touristiques et les questions d’attractivité de ces territoires ruraux et préservés.

A l’heure où l’on s’interroge sur la capacité de l’activité touristique à se réinventer pour ‘ré enchanter’ la proximité,  réduire ses impacts, revenir à des notions d’épanouissement personnel … il nous a paru intéressant de jeter un oeil sur le modèle des Parcs Naturels.

 Pour cet article, nous avons lu, farfouillé et  interrogé Benoît Barrès et Amandine Théron, respectivement  directeur de la Maison du tourisme du Livradois-Forez et chargée de mission tourisme durable au Parc naturel régional Livradois-Forez. Nous leur avons demandé si les Parcs étaient un ‘outil’ de la transformation du tourisme demain et quels étaient les arguments principaux en leur faveur auprès des clientèles notamment. 

CONCEPT // L’origine des Parcs naturels régionaux

Nés en 1967, le concept de Parc naturel régional correspond à un besoin d’aménagement de territoires ruraux concerté, conciliant économie et écologie. Ils attendront 1993 pour obtenir un statut officiel qui leur est octroyé par la Loi Paysage accompagné de 5 missions

 

  • la protection et la gestion du patrimoine naturel, culturel et paysager,
  • l’aménagement du territoire,
  • le développement économique et social,
  • l’accueil, l’éducation et l’information,
  • l’expérimentation, l’innovation

Voir la charte

Comment devient-on Parc naturel régional ?

Depuis les lois de décentralisation de 1982, la création des Parcs est de la compétence des Régions. Pour faire aboutir une démarche de reconnaissance d’un nouveau Parc, le projet doit respecter une charte portant à la fois sur le caractère remarquable du patrimoine (au sens large) concerné, sur la mobilisation large de toutes les parties prenantes et sur la démonstration des capacités à animer le projet.

En France et en Europe, la question transversale que se posent les territoires de parc est de trouver le bon équilibre entre attractivité des destinations et gestion des flux et des contraintes sur les milieux naturels. Tout un programme pour un sujet qui transperce l’ensemble du monde du tourisme désormais.

Déclinée sur un territoire, la démarche globale s’inscrit sur  3 niveaux, dans un esprit ‘démarche de progrès’ avec

  • Une dimension de stratégie territoriale ou comment animer les acteurs pour concevoir un tourisme intelligent et différent, dans un cadre collectif et collaboratif sur plusieurs années.
  • Un volet pour embarquer les opérateurs touristiques privés.
  • Une troisième dimension concernant les agences de voyages, en particulier le  réseau ATR qui revendique et labellise les produits en phase avec ces valeurs.

La co-construction, ADN du Parc

Un projet de Parc, c’est nécessairement un projet concerté de territoire où chaque point de vue doit s’exprimer et accepter de construire une vision collective du développement.

 “Pour moi, c’est tout l’intérêt des parcs, ils ont été les premiers à  penser le développement local dans sa globalité, un projet “Parc” engage la transversalité: tout est lié, quand on parle tourisme, on parle transport, construction, énergie, alimentation, …“

Benoit Barrès

Autour du projet global, se déclinent nombre de dynamiques et d’expérimentations : sur la thématique de la culture avec Ciné Parc [un cinéma itinérant classé Art & Essai et Label Jeune Public], sur l’agriculture et l’alimentation [avec la question du lien ville campagne, portée notamment par le PETR : re-territorialiser l’alimentation et faire travailler zone urbaine et rurale pour imaginer tout l’univers de l’agro entre deux espaces urbain et rural], un travail collectif autour du pain, des filières bois, de l’urbanisme …

En fait, il y a énormément de projets qui font sens, ont un impact et dans lesquels chacun peut s’engager. La logique, c’est le projet et le territoire.

La co-construction, c’est l’ADN des parcs.

Parc : un imaginaire fort

Aujourd’hui, sur le territoire du Parc Livradois Forez, seuls 6% des visiteurs affirment avoir volontairement choisi leur destination en fonction de la mention parc. Pour autant, si ce n’est pas un critère conscient de choix, la notion de Parc Naturel amène avec elle un imaginaire très spécifique et des aspirations que l’on imagine attirer des clientèles elles aussi spécifiques. Une monographie un peu ancienne réalisée par le PNRLF montrait que les appétences des clientèles plutôt familiale en matière d’activités portaient sur les pratiques de pleine nature et culturelles. Pas vraiment hyper surprenant direz vous mais encore faut il y répondre …

Un courant déjà bien engagé.

Benoît Barrès “Les études montrent que le rapport à la nature, l’échange, le rapport humain, … qui étaient déjà très tendance deviennent majeures après la période que l’on vient de traverser. Nous allons lancer une campagne de communication sur  “Les vacances d’après” : notre territoire peut vraiment répondre à ce que les gens vont rechercher

 

  • L’espace
  • Le grand air
  • Des territoires avec un patrimoine, pas seulement une activité de plage,
  • Une approche environnementale
  • Les gens, les vraies rencontres, les petites unités,

Le tourisme dans un territoire de Parc Naturel, c’est une addition qui doit être vertueuse entre identité de territoire, circuits courts, échanges et enrichissement”

Profil //

Un Parc c’est donc un territoire à forte identité, dont les acteurs se mettent en mouvement autour d’un projet collectif. Un territoire de parc, par ce qu’il induit de valeurs, attire des  clientèles touristiques dont les centres d’intérêts sont typés. Cette image produit également un effet attractif pour des  professionnels qui s’y projettent en miroir de leurs propres valeurs.

Ainsi en est il d’Anachronique par exemple, un éco- lieu qui mêle chambres et table d’hôtes et animation autour de l’alimentation (ateliers repas, apports théoriques, bilan,  ateliers pratiques, …). Elisabeth & Gérard racontent le parcours personnel fait de leurs aventures professionnelles et personnelles antérieures, de prises de conscience et de cheminement, qui les a amenés à installer leur projet au coeur du Livradois

“ Ana’chronique est né de la ferme volonté d’incarner un certain idéal de vie via la réflexion et l’expérimentation sur ce qui fonde l’essentiel de l’existence : notre rapport à nous-même et à notre environnement physique et social.”

Ainsi en est il également de la Ferme de Garnasson à Doranges, qui a redonné vie à une belle bâtisse en combinant  chambres et table d’hôtes, exploitation de petits fruits rouges et séjours à thèmes orientés ‘reconnexion à la nature’.

Professionnels : s’engager pour porter et incarner  les valeurs

Au delà de ces deux illustrations, le réseau des Parcs anime le réseau des Coccinelles, un réseau de 53 professionnels du tourisme engagés dans l’une ou l’autre des démarches de tourisme durable, la marque « Valeurs Parc naturel régional » et la Charte européenne du tourisme durable 

Destinée aux opérateurs touristiques privés, la marque est délivrée à l’issue d’un diagnostic et d’un plan de progression très complet, qui couvre l’offre, mais également le projet général de l’entreprise sur les plans économique, social et environnemental.

C’est un dispositif  lourd, au niveau du diagnostic  comme de la technicité nécessaire pour les accompagner.

Mais là, la démarche est intéressante parce que globale et parce qu’elle connecte beaucoup de sujets qui mobilisent les ressources du territoire.

Le Parc Naturel développe des expertises, porte des projets, structure des filières sur des thématiques assez pointues : la biodiversité, les paysages, la construction et les matériaux locaux, la gestion et la préservation de l’eau, la valorisation du patrimoine, les filières agroalimentaires, la sensibilisation …

Chacun de ces sujets sont interrogés à l’échelle des acteurs touristiques, avec cette posture de sensibilisation, d’accompagnement et de progression individuelle.

Travailler sur l’intégration paysagère de ses bâtiments, sur les espèces végétales privilégiées, sur ses pratiques en matière d’impact environnemental, sur la proportion de local dans ses achats, sur sa capacité à permettre à ses clientèles d’appréhender pleinement le territoire qui les accueille mais aussi sur la dimension sociale, sa manière d’exercer son rôle d’employeur ou sa capacité à accueillir la différence, c’est un exercice finalement très … citoyen !

Un concept de résilience mis en oeuvre avant même que  l’heure du mot ne soit venue. Une échelle à taille humaine, avec des indicateurs tangibles et visibles, des coopérations de bon sens, qui ne riment pas avec repli sur soi. Sans être totalement naïf sur la réalité de l’engagement de l’ensemble des acteurs du territoire, il nous semble quand même que cette notion de Parc détient des clés assez significatives pour inventer une nouvelle vie, construite sur la coopération des acteurs vivant sur et d’un territoire pour le faire vivre au bénéfice de tous, sans l’abîmer…